⚔ Les Ordres Militaires et Religieux : Ordre de Saint Jean de Jérusalem - fondé en 1113 c'est un Ordre Hospitalier

L'Ordre de Saint-Jean de Jérusalem, trouve son origine dans un hôpital fondé par un groupe dirigé par Frère Gérard dans la Ville sainte au milieu du XI ème siècle pour héberger les pèlerins venus prier sur le tombeau du Christ, pendant deux siècles, les frères accueillent des voyageurs, riches ou pauvres, malades ou non portent assistance aux déshérités et délivrent des soins médicaux aux blessés de guerre.

L’Ordre des Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem

D’abord ordre religieux, il est investi de responsabilités militaires dès le XII ème siècle avant même de devenir pleinement un ordre religieux-militaire. Pour preuve, l’apparition de frères d’armes, engagés avec les Templiers dans la défense des Lieux saints et des États latins d’Orient, et la grande forteresse du Crac des Chevaliers, qui atteste aujourd’hui encore de l’importance des moyens consacrés à cette tâche. La Terre sainte, mais aussi la péninsule Ibérique, sont le terrain d’élection de leur engagement dans les combats et la défense des forteresses. Pour mener leurs missions sur le « front », ils peuvent s’appuyer sur des ressources accumulées à « l’arrière », dans la chrétienté latine d’Occident, grâce à un puissant réseau de maisons et provinces. Chassé de Terre sainte à la chute d’Acre en 1291 en meme temps que les Templiers, l’hôpital se replie à Chypre avant de s’établir à Rhodes à partir de 1310. Assiégés par Soliman le Magnifique, ils se réfugient à Malte fin 1521.

Organisation de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem

Vers 1130 Raymond du Puy rédige et applique une première règle modelée sur celle de saint Augustin. La règle de saint Augustin est certainement la règle la plus communautaire, elle insiste plus sur le partage que le détachement, plus sur la communion que la chasteté et plus sur l'harmonie que l'obéissance. Composée en latin, elle comporte dix-neuf chapitres :
Comment les frères doivent faire leur profession
Les droits auxquels les frères peuvent prétendre
Du comportement des frères, du service des églises, de la réception des malades
Comment les frères doivent se comporter à l'extérieur
Qui doit collecter les aumônes et comment
De la recette provenant d'aumônes et des labours des maisons
Quels sont les frères qui peuvent aller prêcher et de quelle manière
Des draps et de la nourriture des frères
Des frères qui commettent le péché de fornication
des frères qui se battent avec d'autres frères et leur portent des coups
Du silence des frères
Des frères qui se conduisent mal
Des frères trouvés en possession de biens propres
Des offices que l'on doit célébrer pour les frères défunts
Comment les statuts, dont il est question ci-dessus, doivent être rigoureusement observés
Comment les seigneurs malades doivent être accueillis et servis
De quelle manière les frères peuvent corriger d'autres frères
Comment un frère doit accuser un autre frère
Les frères doivent porter sur leur poitrine le signe de la croix
Cette règle établit clairement trois choses, c'est bien une règle monastique, elle parle par deux fois de l'accueil des malades et elle fixe le signe distinctif des croisés, le signe de la croix sur la poitrine, pour les frères Hospitaliers la chasuble sera noire et la croix sera blanche. La date exacte de l'approbation de la règle par le pape Eugène III n'est pas connue avec exactitude mais les historiens la fixent avant 1159. Il est maintenant possible de parler de la fraternité de l’Hôpital : « C'est la convergence entre la mise en place des premières structures administratives régionales et l'élaboration de la règle par le maître Raymond du Puy et son approbation par le pape Eugène III au milieu du XII ème siècle qui permettent de dire que, alors et alors seulement, l'Hôpital est devenu un ordre ». Un nouvel ordre est né, l'Ordre Hospitalier de Saint-Jean de Jérusalem.

L'Ordre des Hospitaliers, une puissance maritime

Ayant trouvé refuge dans l'île de Chypre et installés à Limassol, les Hospitaliers constatent que la ville est ouverte aux saccages des pirates arabes. Le chapitre ayant refusé l'installation en Italie pour rester au plus près de la Terre sainte à reconquérir, il devient évident qu'il faudra armer une flotte pour défendre l'île. En Terre sainte, l'Ordre armait quelques bâtiments qui permettaient aux membres de l'Ordre de se déplacer et de convoyer des pèlerins. Un certain nombre de ceux-ci se retrouvent à Chypre ayant ramené les réfugiés et les frères de Palestine et d'autres amené d'Europe les participants au chapitre général. L'historien de l'Ordre Giacomo Bosio (1594-1602) écrira : « Bientôt on vit sortir des différents ports de l'île plusieurs petits bâtiments de différentes grandeurs, qui revenaient souvent avec des prises considérables, faites sur les corsaires infidèles » . Établis sur une île, ils n'ont pas d'autre moyen pour continuer le combat que d'aller sur mer et de se payer sur l'ennemi. Si des pirates infidèles sillonnaient les mers pour enlever des pèlerins, le prétexte était parfait pour justifier une guerre de course. Ces deux nouvelles activités de l'Ordre, la marine et la course, vont donner les moyens d'une nouvelle puissance aux Hospitaliers. Le pape Clément V autorise en 1306 le nouveau grand maître Foulques de Villaret (1305–1319) à armer une flotte sans l'autorisation de Henri II roi de Chypre. L'Ordre dispose alors de deux galères, une fuste, un galion et deux dromons. Dans cette région de la Méditerranée orientale, les côtes très découpées, peu accessibles par terre, et la présence de nombreuses îles procurent de nombreux repaires aux pirates favorisant tous les trafics commerciaux mais aussi humains. À cette période, l'île de Rhodes est un refuge sûr pour tous ces trafics. Installé à Malte, l'Ordre développe sa puissance maritime et maintient la paix en Méditerranée en combattant les Ottomans et les Barbaresques avec, pourtant, une flotte nettement inférieure, en unité navale, aux flottes musulmanes. Servir sur les galères de l'Ordre devient un passage obligé pour tous les aspirants chevaliers, souvent reçus dans l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem dès leur plus jeune âge. Les familles nobles, majoritairement françaises, payaient à prix d'or le passage de leurs fils à Malte pour que ceux-ci deviennent pages du grand maître ou d'autres dignitaires de l'Ordre. Après une période de noviciat de douze mois, les novices devenaient chevaliers en prononçant leurs vœux. Ils devaient alors faire leurs caravanes. Ces caravanes, au nombre de trois, (quatre au XVII ème siècle) duraient généralement six mois chacune et formaient entre vingt et trente chevaliers par galère. Rapidement, la flotte de l'Ordre devient une sorte d'académie navale avant l'heure, de grande réputation, attirant des nobles de nationalités étrangères à l'Ordre comme des Russes ou des Suédois qui s'engageaient comme volontaires pour une durée de deux ou trois ans. C'est ainsi que de grandes personnalités navales ont été formées dans l'incubateur maritime de l'Ordre. Quand il fallut recréer une marine française pour affirmer la puissance maritime de la France, le cardinal de Richelieu choisit pour modèle la tradition navale de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem.

L'Ordre des Hospitaliers, une puissance coloniale

Déjà au XVI ème siècle, un l'Hospitalier Nicolas Durand de Villegagnon commande la flotte de Gaspard II de Coligny qui colonisera la cote du Brésil sous le nom de France antarctique. Il donne son nom à l'ilha Villegaignon dans la baie de Rio de Janeiro. Au XVII ème siècle, lors de la colonisation française des Amériques, parmi les administrateurs figuraient des chevaliers Hospitaliers de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem comme Aymar de Chaste, Isaac de Razilly en Acadie, Charles Jacques Huault de Montmagny au Québec ou Philippe de Longvilliers de Poincy aux Antilles. Ils participaient à la colonisation en tant que représentants du roi de France mais non comme membre de l'Ordre. Mais de 1651 jusqu'en 1665, les Hospitaliers interviennent en leur nom comme colonisateur-administrateur aux Antilles. Déjà en 1635, Razilly propose sans succès au grand maître Antoine de Paulo d'établir un prieuré et des commanderies en Acadie. Poincy qui avait servi sous les ordres de Razilly comme commandant de fort en Acadie partageait les vues de son supérieur. Poincy est nommé gouverneur de l'île Saint-Christophe pour le compte de la compagnie des îles d'Amérique avant d'être nommé lieutenant-général pour les Caraïbes par Louis XIII en février 1639. Poincy va investir à titre personnel dans le développement de l'île. Il charge en 1640 François Levasseur de prendre possession de l'île de la Tortue. Son action est considérée comme trop indépendante de ses commanditaires. L'ordre des Hospitaliers lui reproche aussi d'utiliser les produits qu'il tire de sa commanderie française pour entretenir un train de vie non compatible avec celui d'un membre de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Il est finalement remplacé dans ses fonctions par Noël Patrocle de Thoisy le 25 février 1645. Le 25 novembre 1645, Poincy s'oppose au débarquement de Thoisy à Saint-Christophe. Après de multiples péripéties Poincy se fait livrer prisonnier Thoisy et le renvoie en France en 1647. Malgré l'appui des chevaliers de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem à la cour du Roi, Poincy doit payer 90 000 livres en dédommagement à Thoisy. Resté à Saint-Christophe, Philippe de Longvilliers de Poincy établit en 1648 la première colonie européenne sur Saint-Barthélemy et envoie un renfort de 300 hommes sur Saint-Martin pour conforter la petite colonie française en parallèle au traité de Concordia qui a fixé la frontière entre les établissements français et néerlandais, traité toujours en vigueur aujourd'hui. Il fonde en 1650 une colonie sur Sainte-Croix. En 1651, la compagnie des îles d'Amérique fait faillite et Poincy réussi à convaincre le grand maître de l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem Jean-Paul de Lascaris-Castellar d'acheter Saint-Christophe, Saint-Barthélemy, Saint-Martin et Sainte-Croix pour 120 000 écus. C'est Jacques de Souvré qui négocie l'accord qui sera confirmé en 1653 par le roi de France Louis XIV qui reste souverain des îles. Les Hospitaliers ont compétences temporelle et spirituelle sur leurs îles à la condition de ne nommer que des chevaliers des langues du royaume de France et fournir au roi 1 000 écus d'or chaque année anniversaire. Philippe de Longvilliers de Poincy est confirmé dans sa charge de gouverneur mais l'Ordre nomme Charles Jacques Huault de Montmagny, ancien gouverneur de la Nouvelle-France, « général-proconsul » avec siège à Saint-Christophe avec mission de transférer au couvent général de l'Ordre les profits des colonies. Le précédent de Noël Patrocle de Thoisy, engage Montmagny à la prudence et quand il apprend que Poincy refuse de le reconnaître comme général-proconsul, il rentre en France. L'Ordre le renvoie en 1653 avec le titre de « lieutenant-gouverneur » et devant le refus réitéré de Poincy, Montmagny se retire à Cayonne attendant la mort de Poincy. Mais Montmagny meurt en 1657, trois ans avant Poincy. L'ordre de Saint-Jean de Jérusalem nomme Charles de Sales, nouveau « lieutenant-gouverneur » de 1660 à 1664, qui se fait facilement accepter par les populations. Mais la situation est de plus en plus difficile : le traité signé par Poincy peu avant sa mort avec les Anglais et les Caraïbes dure peu les revenus que les Hospitaliers tirent de leurs colonies sont de peu de rendement. En 1660, l'Ordre doit toujours de l'argent à la France pour l'achat des îles. Colbert très intéressé par le développement des colonies fait pression sur les Hospitaliers pour récupérer leurs îles. L'ordre de Saint-Jean de Jérusalem, alors que Claude de Roux de Saint-Laurent est « lieutenant-gouverneur » en 1665, cède ses colonies antillaises à la toute nouvelle compagnie française des Indes occidentales mettant ainsi fin à 14 ans de gestion coloniale.

L'Ordre des Hospitaliers, et la médecine médièvale

Du XVI ème au XVII ème siècle, les Hospitaliers vont développer les techniques de médecine et de chirurgie comme des éponges imbibées d'opium que les malades suçaient jusqu'à s'évanouir. Mais tout commence réellement avec l'Hospital de Jérusalem dès le XII ème siècle (les statuts de Roger de Moulins du 14 mars 1182 officialisent pour la première fois dans le personnel soignant de l'Ordre, des médecins et des chirurgiens, puis avec celui de Rhodes. En 1523 les Hospitaliers innovent dans la médecine d'urgence en créant le premier navire hôpital avec la caraque Santa Maria ils inventent les infirmeries de campagne sous des tentes afin de pouvoir soigner les militaires blessés durant la guerre contre le corsaire ottoman Dragut en 1550. Parallèlement, entre 1530 et 1532, le grand maître Philippe de Villiers de L'Isle-Adam crée une « Commission de santé » composée de deux chevaliers et de trois notables et recrée un grand hôpital la Sacra Infermeria (la Sacrée Infirmerie) et une apothicairerie à Malte. En 1595, une école de médecine est créée puis en 1676, c'est l'école d'anatomie et de chirurgie, puis l'école de pharmacie de Malte en 1677 et enfin en 1687, la bibliothèque médicale. Mais c'est en 1771 qu'est créée la célèbre université de médecine qui ajoutera au rayonnement des Hospitaliers dans toute la Méditerranéenne mais aussi dans tout le monde occidental en 1794, c'est la création de la chaire de dissection. On peut également noter la création de l'école de mathématiques et des sciences nautiques au sein de l'université de Malte en 1782.

Les frères Robespierre, Bonaparte et les Hospitaliers

À l'image des Templiers, l'ordre des Hospitaliers se militarise dès 1123 pour devenir un ordre militaire qui comprend trois catégories : frères chapelains, frères chevaliers et frères servants. Cette organisation en trois classes sans subdivision restera toujours celle des Hospitaliers, nom finalement donné aux membres de l'ordre de Saint Jean de Jérusalem. Contrairement aux Templiers, les Hospitaliers comprirent dès leur retour en France après avoir perdu les Etats Latins en 1291 que le climat politique n'était pas bon pour eux. Les Hospitaliers se mirent donc immédiatement au service du roi Philippe IV le Bel et renièrent l'autorité du Pape, ce qui leur sauva la vie. Les Templiers eux restèrent fidèles au Pape et se mirent le roi à dos, si bien que ce dernier finit par envisager leur extermination. Les Hospitaliers par leur vision opportuniste furent qualifiés de traitres par les Templiers . Au fil de leur histoire mouvementée, les chevaliers hospitaliers deviennent successivement chevaliers de Chypre puis chevaliers de Rhodes et enfin chevaliers de Malte. Même si l’aspect militaire prit le dessus lors de leur occupation de l'île de Malte, l’Ordre garda toujours une dimension hospitalière. Leur hôpital de La Valette, à Malte, était au XVIII ème siècle un des meilleurs d’Europe. Mais avec l'avénement de la révolution Française le vent tourna pour ces Hospitaliers opportunistes. Contrairement à ce que vous pourriez penser Maximilien Robespierre croyait en Dieu, mais il était profondément dégouté par le comportement d'un grand nombre d'écclésiastiques . Il n'aimait pas les Hospitaliers qu'il considérait comme des traitres envers le Pape, et il leur préférait les Templiers qui étaient à ses yeux des hommes intégres qui avaient été injustement traités par la Royauté et l'Eglise Française. Augustin Robespierre le jeune frère de Maximilien était très ami avec le jeune lieutenant Bonaparte ( lui aussi très croyant ) qu'il contribua à promouvoir au grade de Général à la suite du siège victorieux de Toulon contre les Anglais. Les deux hommes s'estimaient beaucoup et Augustin plaida (entre autres) la cause des Templiers auprès de son ami Bonaparte entre 1793 et 1794 quand Augustin était représentant de la Nation en mission pour l'armée ( celle du sud de la France et d'Italie ). Bonaparte retiendra la leçon concernant la fin tragique des Templiers, et, comme les frères Robespierre il considérera les Hospitaliers comme des traitres et des spoliateurs de l'Ordre du Temple.
La capitulation fut signée à bord de l’Orient, le 12 juin, à deux heures du matin par le grand maitre Ferdinand von Hompesch zu Bolheim.
La capitulation fut signée à bord de l’Orient, le 12 juin, à deux heures du matin par le grand maitre Ferdinand von Hompesch zu Bolheim.
En 1798 Bonaparte se lance dans la campagne d'Egypte, mais avant, le 12 Juin il s'arrete à Malte pour venger les Templiers, les chevaliers de l’Ordre de Saint-Jean de Jérusalem remettent (sans combattre) à l’armée française la ville et les forts de la Valette. Ils renoncent, en faveur de la République française, aux droits de souveraineté et de propriété qu’ils ont tant sur cette ville que sur les îles de Malte, de Gozzo et de Cumino. L'Ordre qui s'était placé sous la protection de Paul Ier de Russie après son banissement par Bonaparte, voit une majorité de ses chevaliers s'exiler à Saint-Pétersbourg où ils élisent le tzar comme grand maître en 1798. Mais avec l'abdication du grand-maître Ferdinand de Hompesch en 1799 et la mort de Paul Ier en 1801, s'ouvre pour l'Ordre des Hospitaliers une période noire qui ira jusqu'à son éclatement en ordres concurrents. En plus des ordres historiques issus de la scission protestante comme le très vénérable ordre de Saint-Jean, son principal successeur catholique est l'ordre souverain militaire hospitalier de Saint-Jean de Jérusalem, de Rhodes et de Malte (fondé officiellement en 1961). Pour la petite histoire, sachez encore que devenu Empereur, Bonaparte qui avait conservé toute son admiration pour les frères Robespierre, accordera en 1804 une pension à vie à leur soeur (Charlotte) qui vivait cachée et dans le plus grand dénument depuis que ses deux frères avaient été décapités en 1794, il restituera dans la foulée au clergé Français une grande partie des biens qui avaient été confisqués pendant la révolution. Il convient enfin de noter que Bonaparte oeuvrera à la création du Templarisme dès 1804 , et ses successeurs (Louis XVIII,Charles X,Louis Philippe) lui emboiteront le pas.


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